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Deux réactions au rapport Stora liées au dossier Maurice Audin

lundi 1er février 2021, par Michel Berthelemy

Le rapport remis par Benjamin Stora au Président de la République a suscité des réactions diverses, parfois critiques relativement à certains thèmes abordés. Les Harkis auraient souhaité une plus grande attention, les Pieds-noirs se sont sentis frustrés, les victimes de l’OAS déplorent un manque de reconnaissance, les tenants de la repentance ou de l’excuse sont restés sur leur faim…

Nous ne retiendrons ici que l’accord quasiment unanime, tant du côté algérien que du côté français, sur les conséquences mémorielles induites par « l’affaire Audin ». Les deux réactions qui suivent nous touchent de près, nous qui, à la 4acg, participons depuis longtemps au combat pour la vérité sur la mort de Maurice Audin.

Pour Pierre Mansat, président de l’association Josette et Maurice Audin, il faut aujourd’hui libérer les archives. “Le rapport me paraît tout à fait raisonnable. Il comporte des propositions concrètes qui devront permettre d’avancer de manière sérieuse et d’ouvrir des champs de réflexion entre l’Algérie et la France. Même si le rapport est adressé au président Emmanuel Macron, il faudrait, néanmoins, qu’il fasse écho dans la société française et en Algérie, et qu’il aboutisse à des actions concrètes. Le rapport de Stora pourrait avoir, toutefois, un aspect assez vain si, par exemple, les historiens n’ont pas accès aux archives comme c’est le cas actuellement avec le raidissement de la législation dans ce domaine en France.”

inauguration de la Place Maurice Audin, 19 mai 2012

Quant à Pierre Audin, fils de Josette et Maurice Audin, il fait un vœu  : “Le rapport préconise la réconciliation des mémoires. Il est évident qu’il faut regarder l’histoire en face et solder le passé pour repartir sur de bonnes bases. Mais pour que cela soit possible, il faut aussi tenir compte du présent. La France qui souhaite entretenir de bonnes relations avec l’Algérie ne peut pas utiliser sa politique des visas pour repousser les Algériens ou fermer les yeux sur la répression actuelle de militants politiques et de journalistes.”

Ce qui fait dire à notre ami Jacques Pous que « la vérité est plus importante que des excuses, elle est essentielle. Ceux qui auraient dû s’excuser ou se repentir ne sont plus là et, de plus, on les avait amnistiés. On ne va quand même pas demander aux victimes de se repentir ! Et les victimes c’est vous (les appelés, ndlr) qui à vingt ans avez été embarqués dans une guerre coloniale. Seule la vérité peut nous sauver de ce gâchis. On ne va pas se contenter de dire il y a eu des crimes de part et d’autre et tourner la page. Dans une guerre coloniale, il n’y a qu’un responsable le colonisateur ».

https://www.liberte-algerie.com/actualite/ils-reagissent-au-rapport-de-benjamin-stora-352955

Messages

  • Deux réactions au rapport Stora liées au dossier Maurice Audin

    Ne pas oublier l’avis de :

    Olivier Le Cour Grandmaison, historien :

    “Ce rapport comporte certaines propositions concrètes, mais il demeure en deçà de ce qu’on aurait pu attendre sur deux points essentiels, au moins. Le premier concerne l’accès aux archives. Le rapport recommande d’appliquer la loi de 2008, mais il reste muet sur les dispositions actuelles qui entravent l’accès aux archives. Ce qui constitue une atteinte particulièrement grave à la liberté de la recherche. Le rapport est également très en deçà de ce qu’on aurait pu attendre concernant la reconnaissance des crimes coloniaux. En effet, Benjamin Stora, conformément sans doute aux attentes du chef de l’État, s’abstient de demander la reconnaissance des crimes coloniaux commis par la France en Algérie, non seulement au cours de la dernière guerre (1954-1962), mais aussi tout au long de la conquête et de la colonisation sanglantes du territoire algérien. Plus singulier, Benjamin Stora les euphémise sinistrement en les qualifiant d’exactions. Une recherche consacrée au vocabulaire employé dans ce rapport permet de montrer que la qualification de ‘crime de guerre’ n’est jamais employée. De ce point de vue, le Benjamin Stora devenu conseiller de l’actuel président de la République oublie le Benjamin Stora historien qui sait pertinemment que la torture, les disparitions forcées, les déportations imposées à des millions de civils algériens au cours de la guerre peuvent être qualifiées de crimes de guerre, voire de crimes contre l’humanité. De même, qualifier les massacres du 17 Octobre 1961 à Paris de répression, sans plus de précision, est parfaitement inadéquat eu égard à l’ampleur de ce qui a été perpétré alors par les forces de l’ordre agissant sous l’autorité du préfet de police, Maurice Papon. Enfin, sans reconnaissance officielle, claire, précise et circonstanciée de ces crimes coloniaux, la réconciliation tant vantée restera un vœu pieux. Quant aux descendants des victimes, qu’ils soient Français ou Algériens, ils seront toujours en butte à des discriminations mémorielles et commémorielles inacceptables. Emmanuel Macron, candidat, avait déclaré que ‘la colonisation [était] un crime contre l’humanité’. Emmanuel Macron, chef de l’État, doit désormais le dire haut et fort à l’occasion des différentes commémorations qui s’annoncent.”

  • Seulement deux réactions au rapport Stora ? Heureusement il y a l ’article d’Olivier Lecour Grandmaison
    Question : avez-vous interrogé les historiennes et historiens spécialistes de la Guerre d’Algérie sur leur appréciation du rapport Stora et de leur positionnement vis à vis des injonctions du pouvoir ?
    Autre question : vous êtes en relation avec des historiens et intellectuels algériens pouvez-vous nous diffuser ce qu’ils en pensent ?
    Ce rapport demandé par Macron est-il lié à la politique intérieure française ?
    Merci de répondre à mes attentes et interrogations

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